Outre la restauration des terres, nous nous sommes assurés que la communauté inuvialuite tirerait des avantages de la réhabilitation. « Nous avons travaillé avec des entrepreneurs, des entreprises et des acteurs de la région sur tous les aspects du projet, et ce, dès le début », raconte Lenz Haderlein, directeur du projet. « Pendant l’été, nous avions environ 40 personnes sur place en permanence, dont au moins les deux tiers étaient des membres de la communauté inuvialuite. Nous avons aussi collaboré étroitement avec les organismes locaux de réglementation et la Régie des eaux, et avons informé la communauté de façon régulière au moyen de consultations publiques. »
Les travaux de réhabilitation comprenaient la stabilisation du littoral marin et la restauration d’un quai; un avantage à long terme pour les habitants qui pourront l’utiliser pour la pêche, le stockage et à d’autres fins. Les marins profiteront en outre d’autres améliorations, comme le retrait des pilotis de bois d’un vieux quai qui présentaient un risque pour la navigation.
De plus, la communauté a utilisé à bon escient le béton laissé sur place. En effet, les changements climatiques et la hausse du niveau de la mer accentuent les risques d’érosion côtière et d’inondation dans le village de Tuktoyaktuk. Avec le soutien de la population locale, nous avons donc découpé le béton en dalles, au lieu de le jeter, puis nous avons créé des lignes de défense contre les inondations.
Réduire les risques associés aux changements climatiques
Travailler dans une région aussi éloignée dans l’Arctique canadien présentait plusieurs défis, surtout avec les changements climatiques et la nécessité de préserver l’environnement précieux, mais fragile de la toundra.
Protéger le pergélisol est crucial, puisque tout dommage peut avoir d’importantes répercussions environnementales. Déjà vulnérable en raison du réchauffement climatique, le pergélisol est essentiel à la stabilité des écosystèmes de la toundra. S’il fond, il contribuera aussi de manière importante au réchauffement planétaire mondial. Par ailleurs, il lui faut beaucoup de temps pour se reconstituer après une perturbation physique.
Un plan rigoureux de protection du pergélisol a par conséquent été mis en place tout au long des travaux d’excavation. Le pergélisol était ainsi recouvert et protégé avec de la terre propre dès le retrait de la terre contaminée et des débris.
Une autre considération essentielle a été l’élimination des sols contaminés d’une manière sécuritaire et respectueuse de l’environnement. Grâce aux longues journées d’été comptant 24 heures d’ensoleillement, au moins un tiers des sols contaminés par les hydrocarbures a pu faire l’objet d’une bioremédiation.
Cependant, il n’était pas possible de réhabiliter le reste des sols sur place. Durant la première année du projet, l’envoi au site d’enfouissement était la méthode d’élimination la plus pratique et efficace. Plusieurs voyages ont ainsi été faits vers le site d’enfouissement approprié le plus près, qui se trouvait à 2 300 kilomètres. « Ça ne fonctionnait pas. Les travailleurs chargeaient les sacs de sol dans le camion et disaient au revoir au conducteur, qui revenait sept jours plus tard pour le prochain chargement. Ça prenait trois jours au conducteur pour se rendre au site d’enfouissement et trois jours pour en revenir, un aller-retour de 4 600 kilomètres en camion dans des conditions hivernales. Et ce n’était pas seulement un problème en raison des émissions de carbone. Les transporteurs routiers exigeaient que le sol soit mis en sac pour le transport, ce qui augmentait l’exposition des travailleurs au risque. Il fallait donc aussi tenir compte des considérations relatives à la santé et la sécurité », explique Lenz Haderlein.
La solution passe donc par la construction d’un site d’enfouissement local. On tente actuellement d’obtenir les autorisations nécessaires, en plus d’organiser des consultations avec la communauté. L’élimination du sol contaminé dans le nouveau site d’enfouissement réduira les émissions de GES de dix fois par rapport à la solution initiale.