De nombreuses substances per- et polyfluoroalkyles (SPFA) sont omniprésentes dans l’environnement, très mobiles, persistantes et bioaccumulations. À ce titre, les SPFA continuent de représenter un défi universel et complexe.
En Australie, la directive relative au Plan national de gestion de l’environnement pour les SPFA (NEMP, lien en anglais) a été mise à jour et approuvée par le Commonwealth et certains états pour sa mise en œuvre. Le National Environmental Management Plan [(NEMP 2.0) Plan national de gestion de l’environnement], compilé par des représentants des autorités étatiques de protection de l’environnement et publié en mai 2020, est la deuxième étape vers une meilleure gestion environnementale des SPFA et l’intégration de celles-ci dans les cadres réglementaires et les politiques existants.
Vous travaillez avec des SPFA ou vous êtes responsable d’environnements dont on sait qu’ils sont ou pourraient être touchés par des SPFA? Vous devez suivre les directives approuvées pour l’enquête, l’évaluation, la gestion et l’assainissement des terres et des eaux contaminées par des SPFA, et pour le traitement des déchets contenant des SPFA.
Nous examinons ici certaines des mises à jour et des priorités du NEMP 2.0 et ce qu’elles peuvent signifier pour vous.
Évaluations et plan d’échantillonnage
Dans le NEMP 2.0, l’accent est mis sur la prévention de la contamination, notamment par des stratégies visant à limiter la migration des SPFA vers l’extérieur du site, à réduire la masse des sources de SPFA et à entretenir de manière appropriée les matériaux contenant des SPFA (produits et déchets, par exemple). Par conséquent, le NEMP 2.0 souligne et réitère le principe central des évaluations traditionnelles des terres contaminées : l’importance de construire un modèle conceptuel de site robuste et la nécessité d’envisager toutes les voies de contamination par les SPFA. L’évaluation des voies d’accès et des récepteurs sensibles en dehors du site dès les premières étapes d’une enquête reste une priorité importante. Le NEMP 2.0 comprend une collection de modèles conceptuels de sites que vous pourriez adapter aux sources, aux voies d’accès et aux récepteurs sensibles de votre site.
Bien entendu, il est difficile de comprendre le devenir et le transport dans l’environnement lorsqu’il s’agit d’un produit aussi mobile, bioaccumulable et persistant dans l’environnement que les SPFA. L’approche de précaution et l’évolution des connaissances scientifiques sur l’incidence des SPFA sur la santé humaine et l’environnement ajoutent à la complexité. Dans ce contexte, l’échantillonnage peut devoir s’étendre au-delà des sols, des eaux souterraines, des sédiments et des eaux de surface habituels pour inclure également le biote (par exemple, le sérum du bétail et les tissus des fruits de mer) afin de mieux évaluer le risque sur la base de données spécifiques au site.
Vous devrez peut-être envisager des programmes d’échantillonnage nouveaux ou novateurs qui répondent spécifiquement aux défis à relever. Pour mieux cibler votre échantillonnage, réfléchissez bien à la question à laquelle vous espérez répondre en prélevant des échantillons de SPFA. Pour quelles décisions d’assainissement, d’atténuation ou de gestion, vos données d’échantillonnage vont-elles servir? Le NEMP 2.0 comprend un arbre décisionnel mis à jour pour vous aider à concevoir votre échantillonnage.
Le NEMP 2.0 ajoute également l’« échantillonnage passif » comme outil supplémentaire d’évaluation et inclut la « charge et le flux de masse » dans les considérations clés en matière de risque. Ces évaluations complexes des eaux de surface et des eaux souterraines nécessitent une réflexion approfondie et l’utilisation de techniques et de méthodes d’échantillonnage validées pour fournir des informations utiles. Lorsqu’elles sont bien réalisées, elles permettent de cibler et de hiérarchiser de façon optimale les stratégies d’atténuation de l’exposition aux SPFA sur votre site.
Lignes directrices environnementales
Le NEMP 2.0 comprend une mise à jour mineure de la ligne directrice sur les sols pour les emplacements résidentiels. Toutefois, cette directive sur les sols n’est pas applicable lorsque les gens cultivent et consomment de grandes quantités de produits cultivés à la maison, tels que des œufs, de la viande (par exemple de l’agneau ou du bœuf), des légumes ou du lait. Dans ces situations, les autorités réglementaires chargées de la protection de l’environnement exigeront une évaluation des risques spécifiques au site si le terrain résidentiel ou rural a été affecté par la contamination par les SPFA.
Pour les évaluations écologiques, les lignes directrices relatives aux sols restent inchangées et sont toujours provisoires. Cependant, tous les sites et emplacements, qu’ils soient résidentiels ou industriels, doivent désormais être évalués à l’aune de la même ligne directrice : la faune sauvage n’est pas sélective quant aux endroits où elle se nourrit. En revanche, pour les sites industriels, où la faune est susceptible d’être moins présente, un nouveau processus d’évaluation des sols est disponible. Il est désormais nécessaire de satisfaire aux caractéristiques spécifiques du site pour que la ligne directrice écologique supérieure soit applicable. Par exemple, le développement intensif pour une couverture de plus de 80 % des surfaces dures.
Le NEMP 2.0 comprend maintenant des instructions claires pour appliquer les valeurs guides pour le biote au perfluorooctanesulfonate (PFOS) en plus du perfluorohexane sulfonate (PFHxS), et pas seulement au PFOS. Il a été adapté pour tenir compte des incertitudes et des « toxicités potentiellement similaires » des PFHxS et des PFOS chez les mammifères et les oiseaux. Si on considère la santé écologique des oiseaux, la ligne directrice du NEMP 2.0 pour les SPFA dans les œufs d’oiseaux (sauvages) suggère que les oiseaux peuvent être plus sensibles aux SPFA et la ligne directrice a ainsi été réduite de 10 fois. Cela peut être particulièrement important pour la prise en compte des espèces d’oiseaux migrateurs qui fréquentent les zones humides côtières.
Réutilisation bénéfique des sols et manutention des matériaux sur place
Tous les principes de réutilisation des sols sont fondés sur la volonté de protéger la santé humaine et l’environnement. Le NEMP 2.0 n’a pas formulé de critère national unique pour la réutilisation bénéfique des sols; cependant, il recommande d’utiliser plusieurs sources de données pour appuyer les décisions de réutilisation des sols lorsque l’intention est que le matériau reste en place à long terme. Pour une réutilisation bénéfique, une compréhension détaillée du risque de contamination par les SPFA est nécessaire. Le NEMP 2.0 présente plusieurs méthodes différentes pour envisager la réutilisation des sols sur ou hors site et le diagramme de réutilisation des sols a été développé, afin de présenter des options pour naviguer dans le processus.
Pour vous aider à planifier votre projet et à prendre des décisions, le NEMP 2.0 fournit désormais davantage de conseils sur la manipulation des matériaux sur le site, y compris une matrice basée sur les risques concernant la durée du stockage et des exigences de conception détaillées pour le confinement. Il existe également une liste de contrôle utile (annexe E) pour le stockage des produits chimiques non utilisés contenant des SPFA. Comme le conseille la liste de contrôle, les contrôles du stockage des produits chimiques doivent être validés par des spécialistes afin de garantir la conformité de vos méthodes avec le NEMP 2.0. Cette validation permettra de réduire le risque de dommages environnementaux dus à des fuites ou à des déversements.
Gestion des eaux usées
Reconnaissant que des recherches supplémentaires sont encore nécessaires pour mieux comprendre le devenir et le transport des SPFA dans l’environnement, notamment en ce qui concerne les rejets des systèmes de traitement des eaux usées, le NEMP 2.0 recommande de maintenir l’approche de précaution pour le traitement des eaux usées afin de réduire les risques.
Les gestionnaires de l’eau (c.-à-d. les services d’eau potable et d’eaux usées et les exploitants de sites d’enfouissement) disposent d’un contexte et de conseils supplémentaires sur la gestion des eaux usées dans le cadre du NEMP 2.0; toutefois, il ne fournit pas de critères de rejet. L’une des priorités d’une future mise à jour du NEMP sera d’établir des critères et des conseils de gestion des SPFA en poursuivant la collaboration avec l’industrie de l’eau. Dans l’intervalle, les responsables des services de distribution d’eau doivent élaborer leur propre cadre de gestion des SPFA fondé sur les risques.
Le NEMP 2.0 fournit un modèle de cadre de gestion des SPFA qui tient compte des besoins et des circonstances spécifiques des services d’assainissement (p. ex., capacité de traitement), des intrants (p. ex., accords sur les déchets commerciaux avec l’industrie), des rejets (p. ex., conditions de permis de protection de l’environnement et conditions de consentement des installations) et des milieux récepteurs (p. ex., acceptation par la collectivité, valeurs écologiques). Le NEMP 2.0 renforce le fait que la principale stratégie de contrôle des risques consiste à réduire au minimum les sources de SPFA entrant dans les eaux usées.
Il est possible d’opérer une transition vers des changements dans la gestion des SPFA d’une manière collaborative, car les dirigeants des services d’eau et d’autres industries revoient leurs accords sur les déchets commerciaux et toutes les parties concernées négocient.
Avis d’expert
Le NEMP 2.0 reconnaît que les SPFA sont un sujet très complexe avec des aspects techniques difficiles, et recommande aux parties prenantes de l’obligation environnementale de « demander l’avis d’un expert », en particulier sur des questions telles que les précurseurs et les produits de transformation des SPFA, la rédaction d’un plan de qualité robuste pour l’échantillonnage et l’analyse, l’échantillonnage du biote, les déchets commerciaux contenant des SPFA, et les stratégies d’atténuation des risques pour gérer un événement de contamination des eaux usées.
Le défi de la contamination par les SPFA peut être relevé, mais il faut souvent faire appel à des spécialistes ayant l’expérience de l’élaboration et de l’application de méthodes rentables fondées sur le risque. En fonction de votre situation, vous devrez peut-être faire appel à l’expertise de spécialistes dans des domaines tels que la toxicologie, l’évaluation des risques pour la santé, l’assainissement de l’environnement, la modélisation hydraulique et la conception civile et géotechnique.
Avec le NEMP 2.0 et les bons conseils, vous pouvez vous frayer un chemin à travers les complexités et les incertitudes posées par cette catégorie de contaminants et parvenir à une solution pratique qui non seulement satisfait aux exigences réglementaires et de conformité actuelles et limite les responsabilités futures, mais assure également un environnement plus sûr et plus sain pour les générations futures.
Ressources utiles :
- Mise à jour de l’arbre décisionnel du plan d’échantillonnage [NEMP 2.0 – Section 12.1.2 (en anglais)]
- Liste de vérification pour le stockage des produits chimiques inutilisés contenant des SPFA [NEMP 2.0 – Annexe E (en anglais)]
- Matrice basée sur les risques concernant la durée du stockage et les exigences de conception détaillées [NEMP 2.0 – Tableau 6 (en anglais) Section 10.1]
- Modèle de cadre de gestion des SPFA pour les services de distribution d’eau [NEMP 2.0 – Annexe D (en anglais)]
À propos des auteurs
Greg Stratton est spécialiste en chef de l’environnement chez WSP et réside à Canberra, en Australie. Il compte plus de 20 ans d’expérience dans un large éventail de projets environnementaux et dirige régulièrement des équipes multidisciplinaires qui réalisent des projets complexes d’évaluation et d’assainissement de sites. L’expérience de Greg Stratton en matière de projets comprend des sites touchés par des contaminants conventionnels, non conventionnels et émergents présents dans des environnements en mer et sur terre. Greg Stratton est actuellement le responsable de la communauté technique de WSP pour l’Asie-Pacifique en matière d’enquête et d’assainissement des sites de SPFA. Son expérience des SPFA comprend des évaluations détaillées des sites, l’évaluation des risques pour la santé humaine et l’écologie, l’assainissement et la gestion des matériaux.
Matthew James est spécialiste en chef de l’environnement chez WSP et réside à Sydney, en Australie. Il dirige les services consultatifs du gouvernement et de l’environnement pour WSP en Nouvelle-Galles du Sud. Son expérience en matière de SPFA comprend des évaluations de terrains contaminés, la conception d’échantillonnages et des conseils stratégiques aux clients. Matthew a également une expérience de la réglementation des SPFA, de l’élaboration de politiques, de l’évaluation des risques et de la direction (gouvernement de Nouvelle-Galles du Sud). Ses expériences de liaison avec les parties prenantes ont inclus de multiples agences (État, Commonwealth et EnHealth), des sociétés et des communautés à travers la Nouvelle-Galles du Sud et l’Australie.