L’un des principaux résultats qui devraient se dégager des discussions qui auront lieu entre les chefs d’État lors de la COP15 est l’établissement d’une mise à jour pour le Cadre mondial de la biodiversité. La vision offerte par ce cadre est celle d’un monde où, « d’ici 2050, la diversité biologique est valorisée, conservée, restaurée et utilisée avec sagesse, pour assurer le maintien des services fournis par les écosystèmes, préserver la santé de la planète et procurer des avantages essentiels à tous les peuples ».
Il n’existe pas de solution unique qui nous permette d’atteindre cet objectif. En effet, aucune mesure universelle ne va mener à la protection et la restauration complètes de notre biodiversité nationale ou mondiale. Il faudra plutôt adopter une série de mesures, à différentes échelles, pour obtenir l’incidence générale positive requise pour assurer l’avenir de notre planète.
Les mesures compensatoires en matière de biodiversité sont un excellent outil pour équilibrer ou améliorer les dommages subis par la biodiversité. Cet outil peut être utilisé pour contrer les effets de tout développement, qu’il s’agisse de lignes de transport d’électricité, d’autoroutes, de bâtiments commerciaux ou d’exploitations minières.
L’évolution de l’utilisation des mesures compensatoires
Bien que le concept consistant à utiliser la compensation pour « payer » pour les dommages faits à un écosystème naturel dans le domaine terrestre soit relativement récent au Canada, les mesures compensatoires en matière de biodiversité, dans un sens plus général, ne le sont pas.
De fait, le Canada est un chef de file de la compensation en matière de biodiversité depuis de nombreuses années dans le domaine de la pêche. Les soumissionnaires souhaitant développer un projet qui aura des conséquences néfastes sur les poissons au Canada doivent en effet les compenser en vertu de la Loi sur les pêches. Des mesures compensatoires pour les milieux humides ont également été prises dans différentes provinces et différents territoires, y compris l’Alberta (en anglais seulement), ce qui permet de compter sur un processus de demande clair pour les activités impliquant des milieux humides ainsi que sur une série de règlements qui doivent être respectés.
Les mesures compensatoires liées aux terres constituent le prochain pas à franchir dans le domaine de la biodiversité au Canada. Bien que ces mesures n’en soient qu’à leurs balbutiements dans plusieurs régions du monde, y compris au Canada, une augmentation de leur utilisation est prévue à mesure que les intervenants commerciaux, industriels et gouvernementaux chercheront des moyens de stimuler la croissance sans causer de dommages environnementaux irréversibles. En Angleterre, des progrès ont pu être observés à ce titre grâce à l’adoption d’une loi autorisant l’utilisation de mesures compensatoires liées aux terres pour certains types de développement.
Bien qu’au Canada, la mise en œuvre de telles mesures demeure minime à ce jour, certaines entreprises cherchent à prendre les devants. Teck Resources Limited, un géant des mines, a annoncé en juin 2022 (en anglais seulement) son engagement à avoir des répercussions positives sur la nature grâce à « ...la conservation ou la réhabilitation d’au moins trois hectares pour chaque hectare touché par ses activités minières ». Cet engagement s’accompagne aussi d’investissements en faveur de la conservation d’environ 14 000 hectares de terres au Canada et au Chili.
Chez WSP, notre équipe travaille étroitement avec plusieurs clients pour développer des systèmes de comptabilisation des pertes et des gains, et ce, en vue de les aider à mettre en œuvre la hiérarchie intégrale des mesures d’atténuation, à limiter leurs effets sur la biodiversité et à comprendre leurs obligations en matière de mesures compensatoires. Ce travail aidera les soumissionnaires à se concentrer sur les trois premières étapes de la hiérarchie des mesures d’atténuation (éviter, réduire au minimum et réhabiliter). Bien sûr, les mesures compensatoires peuvent se révéler coûteuses et difficiles sur le plan technique. Voilà pourquoi il est essentiel de s’assurer que toutes les options permettant de gérer les répercussions sur la biodiversité au moyen de la première partie de la hiérarchie des mesures d’atténuation ont été entièrement explorées lors de la phase de conception de projet, de manière à réduire les obligations compensatoires et à préserver la biodiversité.
Élargir la mise en œuvre des mesures compensatoires liées aux terres
Il reste une bonne part de travail à abattre advenant un accroissement de l’utilisation des mesures compensatoires liées aux terres au Canada et ailleurs. Pour commencer, davantage de recherches doivent être menées quant à l’efficacité de telles mesures. En effet, il n’y a pas assez de bons exemples de mesures compensatoires liées aux terres qui ont fait l’objet d’études suffisantes pour prouver leur réussite et pour orienter une future mise en œuvre.
Au Canada, les règlements en ce sens doivent être plus clairs. Nous devons étoffer notre gamme de solutions techniques et notre savoir-faire au sein du secteur. Nous devons aussi nous concentrer sur la hiérarchie des mesures d’atténuation et éviter les effets potentiels non désirés des mesures compensatoires en matière de biodiversité (p. ex., les « permis de destruction »).
Nous avons l’occasion de protéger et de restaurer notre biodiversité, et les engagements pris lors de la COP15 aideront le Canada à poursuivre dans cette voie. Les mesures compensatoires liées aux terres font partie de la solution et, à mesure que nous comprendrons mieux leur efficacité globale, elles se révéleront sans doute un outil important et nécessaire pour atteindre nos objectifs nationaux et mondiaux en matière de biodiversité.