Structurer le financement de l’action climatique pour atteindre les cibles de la COP26
La mobilisation du financement de l’action climatique est un des objectifs prioritaires de la COP26, mais nous devons mettre en place les structures adéquates pour nous assurer que les investissements nous guident vers la carboneutralité.
Les manchettes sont sans équivoque : les enjeux entourant la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP26) sont considérables (article en anglais). Le sixième Rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat révèle que le monde file vers 3 °C de réchauffement (site Web en anglais), ce qui est loin de l’objectif de 1,5 °C de l’Accord de Paris, à moins que nous n’atteignions globalement la cible de carboneutralité d’ici 2050 et que des changements drastiques soient effectués durant la prochaine décennie.
La mobilisation du financement de l’action climatique (en anglais) est l’un des quatre grands objectifs de la COP26. En 2010, les pays développés se sont engagés à mobiliser annuellement 100 milliards USD afin de répondre aux besoins de réduction d’émissions et d’adaptation aux changements climatiques des pays en développement. Toutefois, un nouveau rapport du ministre canadien de l’Environnement et du secrétaire d’État allemand à l’Environnement révèle que cet objectif n’a pas été atteint (en anglais). Selon les estimations de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), il manquait en 2019 encore 21 milliards USD aux pays développés pour atteindre l’objectif en matière de financement climatique. Comme vient tout juste de le faire le Canada, les pays développés devront maintenant redoubler d’efforts pour remplir leur promesse d’un financement de 100 milliards USD. Comme toujours, le problème se trouve dans les détails.
Voici certaines des principales difficultés et occasions qui attendent le Canada au moment où les nations se réunissent pour mobiliser le financement pour l’action climatique à la COP26 :
- Bien qu’on assiste à une croissance des portefeuilles d’investissement durables, des millions de dollars canadiens continuent d’être investis dans les combustibles fossiles. Ces capitaux devraient être réalloués de manière à délaisser les investissements qui ne cadrent pas avec l’accord de Paris. Cette solution est l’une des façons les plus efficaces d’investir dans une économie à faible émission de carbone. Le seul problème? Un désinvestissement rapide risque de perturber les emplois et les économies régionales. Les stratégies de désinvestissement doivent donc être graduelles. Il est essentiel que les plans de transition soient justes (en anglais), adaptés au contexte géographique, politique et social, et intègrent une vision et un processus auquel adhèrent les travailleurs, l’industrie et les gouvernements. Ils doivent assurer le soutien des économies et des employés les plus durement touchés, diminuer le plus possible les répercussions négatives et maximiser les occasions positives qu’apporte la transition vers une économie à faible émission de carbone.
- Plusieurs produits de placement durables et populaires ne financent en réalité pas de nouveaux investissements, ne sont pas conformes aux cibles de carboneutralité ou ne nécessitent pas l’évaluation des effets de leurs émissions, ce qui ne permet pas de savoir si un impact se produit. Par exemple, les obligations vertes se veulent l’outil rêvé permettant d’investir dans des projets durables sur le plan environnemental et aidant les investisseurs et les émetteurs à classer les projets comme « écologiques ». Cependant, les exigences de projets sont souvent définies de manière vague et individuelle, et certaines ne reflètent que les émissions évitées, par exemple un investissement dans un nouveau bâtiment certifié LEED au lieu d’une rénovation majeure d’un bâtiment existant. De plus, l’argent des obligations vertes existantes risque d’être acheminé à des projets qui auraient reçu du financement, qu’ils soient « écologiques » ou non. Apposer simplement l’étiquette « écologique » à un prêt n’entraine pas automatiquement de nouvelles réductions nettes des émissions ni ne permet la réalisation de nouveaux projets qui n’auraient pas vu le jour sans les obligations vertes. Dans la mesure du possible, les produits de placement durables devraient soutenir des projets qui s’alignent avec l’objectif de carboneutralité d’ici 2050, comme par le financement de bâtiments carboneutres (ou prêts à une consommation nette zéro) ou de technologies d’élimination du carbone. Ils devraient également intégrer le critère d’additionnalité, c’est-à-dire fournir de nouveaux capitaux nets dédiés à ces projets plutôt que de se contenter de qualifier d’anciens investissements « d’écologiques ». Il est aussi essentiel de calculer l’incidence des investissements, tels que les obligations vertes, et de les classer selon les émissions évitées ou réduites (en anglais) de sorte à garantir un investissement judicieux en faveur d’une économie à faible émission de carbone.
- Pour ce qui est des organisations, les entreprises et les institutions bancaires canadiennes doivent procéder à une importante transformation organisationnelle de sorte à gérer les risques climatiques relatifs à leurs opérations, à leurs investissements et à leurs stratégies d’affaires. Les entreprises sont fortement encouragées à mesurer et à divulguer leurs risques climatiques dans le cadre de recommandations telles que celles du Groupe de travail sur l’information financière relative aux changements climatiques (GIFCC). Cependant, de nombreux investisseurs et intervenants ne trouvent pas les renseignements actuels utiles pour prendre des décisions d’investissement en fonction du climat. On remarque souvent un manque de cohérence et de détails entre les renseignements publiés, ce qui rend les comparaisons difficiles (cliquez ici pour consulter le livre blanc de WSP intitulé « Promouvoir une action climatique significative basée sur les renseignements publiés conformément aux recommandations du GIFCC »). Les Autorités canadiennes en valeurs mobilières ont récemment proposé des exigences (en anglais) visant à normaliser la divulgation d’informations relatives aux changements climatiques des entreprises, ce qui aiderait à résoudre le problème de cohérence et de pertinence des divulgations.
- Alors que la divulgation des informations sur les risques financiers causés par les changements climatiques se révèle essentielle et potentiellement obligatoire, une pression accrue pèse sur les banques et les gestionnaires d’actifs pour qu’ils quantifient l’impact de leurs portefeuilles d’investissement sur le climat. Les « émissions associées à des investissements » représentent des émissions provenant de portefeuilles d’investissement et de prêts et calculées grâce aux données divulguées par chaque entreprise au sein du portefeuille ou grâce à l’activité des prêts, en tenant également compte de la taille des avoirs. Dans le cas des institutions financières, ces émissions sont généralement nettement plus élevées que les émissions opérationnelles, mais jusqu’à présent, sont rarement divulguées (cette tendance est cependant en train de changer). L’une des raisons derrière cette omission est que le calcul des émissions associées à des investissements est complexe et nécessite des détails précis sur chaque entreprise ainsi que chaque prêt. Des méthodologies telles que celle du Partnership for Carbon Accounting Financials (PCAF) (en anglais) ont été élaborées pour différentes classes d’actifs, mais doivent être élargies à d’autres classes pour permettre une divulgation plus exhaustive et cohérente des émissions financées. Les institutions financières canadiennes doivent quantifier les émissions associées à leurs investissements pour s’assurer que ces derniers ont un impact important et mesurable sur les changements climatiques. Elles devraient également faire connaitre leurs méthodologies de calcul en matière d’émissions associées à des investissements afin de garantir la cohérence de leur divulgation.
Le Canada a récemment fait un pas important vers la mesure des émissions associées à des investissements. En effet, en octobre 2021, six des grandes banques canadiennes se sont jointes à l’alliance bancaire Net Zéro (NZBA), une initiative menée par Mark Carney, l’ancien gouverneur de la Banque du Canada. Les banques s’engagent à aligner leurs portefeuilles de prêts et d’investissement en vue de respecter la cible de 1,5 °C et d’atteindre l’objectif zéro émission nette d’ici 2050. Cet objectif comprend également l’élimination complète des émissions financées, ce qui veut dire que les banques devront mettre en place un système pour quantifier leurs investissements et leurs portefeuilles de prêts. Là encore, tout se jouera dans les détails des stratégies mises en œuvre par ces institutions qui promettent également l’élaboration de plans d’action à court terme.
Maintenant ou jamais
La réussite de la mobilisation du financement de l’action climatique dépendra de la capacité des secteurs public et privé à créer un système dans lequel l’économie à faible émission de carbone pourra prospérer, tout en réduisant suffisamment les émissions pour atteindre la carboneutralité. Autrement dit, les changements climatiques doivent être pris en compte dans toutes les décisions financières, que ce soit la provenance des fonds (ou leur réallocation), les projets financés, ou la transparence de leurs impacts. De plus, il est crucial que les investisseurs, les gestionnaires d’actifs et les banques gèrent et divulguent les risques relatifs au climat et répondent des émissions associées à leurs prêts et à leurs investissements.
Les points suivants sont particulièrement importants à l’heure où tous se tournent vers l’issue de la COP26 et les années à venir :
- Les capitaux devraient être réalloués de manière à délaisser les investissements qui ne cadrent pas avec l’accord de Paris.
- Les plans de transition doivent être justes et assurer le soutien des économies et des employés les plus durement touchés.
- Les produits de placement durables devraient soutenir des projets conformes à l’objectif de carboneutralité d’ici 2050 et intégrer le critère d’additionnalité.
- Il est important de mesurer et de divulguer les émissions de gaz à effet de serre évitées ou réduites grâce aux produits de placement durables, telles que les obligations vertes.
- Les institutions financières canadiennes doivent quantifier les émissions associées à leurs investissements pour s’assurer que ces derniers ont un impact important et mesurable sur les changements climatiques et que les cibles sont suivies et atteintes.
Nous envisageons clairement l’avenir et le concevons dès aujourd’hui
WSP est fermement déterminée à aider le Canada à profiter des occasions que présente la transition vers une économie à faible émission de carbone. Notre équipe aide les entreprises, les banques et les investisseurs à quantifier les émissions associées à leurs opérations et à leurs portefeuilles. Nous sommes en mesure d’accompagner nos clients dans la mesure, la gestion et divulgation de leurs émissions et de les aider à mettre en place des plans de transition justes vers un système à faible émission de carbone. Nous aidons également les entreprises à comprendre et à gérer les risques climatiques et à divulguer ces informations conformément aux recommandations du GIFCC ou d’autres cadres.
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